Exploration des abysses : une seconde vie pour le Nautile
Construit en partenariat avec la Direction générale de l’armement (DGA) et la Direction des constructions et armes navales (DCAN), le submersible Nautile a été mis en service en 1984. Depuis, il explore les abysses jusqu’à 6000 mètres de profondeur : pendant six à huit heures par plongée, un scientifique et deux pilotes observent les fonds marins et mènent des expérimentations depuis la sphère du sous-marin. Seuls cinq pays au monde, les États-Unis, le Japon, la Chine, la Russie et la France possèdent aujourd’hui un sous-marin doté de telles capacités.
Une capacité hautement stratégique pour le deuxième plus grand pays maritime du monde
Couvrant environ les deux tiers de la surface du globe, l’océan, plus grand écosystème de la planète, reste encore largement méconnu et recèle un fort potentiel de découvertes scientifiques. L’exploration des grands fonds s’avère désormais hautement stratégique et constitue l’un des axes du plan France 2030. Alors que ce plan met l’accent sur la robotisation (engins autonomes à grande capacité ou en essaim, véhicules téléopérés depuis la surface, réseaux câblés de mesure ou de détection), la plongée habitée profonde se démarque par sa capacité à permettre la présence humaine dans les abysses. Cette capacité nécessite un savoir-faire particulier, et la France est le seul pays de l’Union européenne à concevoir, maintenir et opérer un sous-marin habité apte à plonger à 6000 mètres de profondeur.
La France renouvelle sa capacité de plongée habitée profonde
Après analyse des atouts et des contraintes de la plongée habitée profonde, et étude du contexte international des recherches en sciences et technologies marines, l’accent a été porté sur les robots sous-marins profonds. En cours de modernisation, le véhicule sous-marin Victor 6000 est opéré par un câble depuis la surface : il dispose de capacités complémentaires à celles du Nautile et intégrera prochainement de nouveaux capteurs et outils de prélèvements et d’analyse in situ pour récolter encore plus de données scientifiques qu’aujourd’hui. Quant au dernier né des engins de la Flotte océanographique française, le robot autonome Ulyx, il est dédié à la cartographie et à l’inspection des fonds marins jusqu’à 6000 mètres de profondeur. Développé entre 2016 et 2022, il est actuellement en phase de validation technique et opérationnelle.
C’est dans ce contexte que le comité directeur de la Flotte océanographique française avait décidé en 2018 de remplacer à terme le Nautile par un deuxième véhicule sous-marin téléopéré (ROV) à l’horizon 2025.
L’arrêt du Nautile aurait signifié le non-renouvellement de compétences techniques et opérationnelles rares, ainsi que la perte de tout un savoir-faire. Des sujets stratégiques auxquels l’État, à travers le plan France 2030, est sensible car ils mettent en jeu la souveraineté nationale. La décision de maintenir une capacité de plongée habitée profonde et des compétences associées à l’horizon 2035 a donc été annoncée par le président de la République, Emmanuel Macron, le 12 décembre 2023.
Des avancées technologiques et un savoir-faire unique
À travers le plan France 2030, la France aspire à développer un secteur industriel incontournable à l’échelle mondiale dans les technologies, produits et services sous-marins et à conserver sa capacité stratégique à maintenir une présence humaine dans les grands fonds.
Le Nautile, comme ses confrères Victor 6000 et Ulyx, se démarque par les nombreux instruments et fonctionnalités scientifiques mis en œuvre qui en font un atout majeur pour l’exploration. Il offre en particulier une perception directe de l’environnement sous-marin et navigue avec une grande souplesse. D’un point de vue opérationnel, l’utilisation d’un engin habité en association avec un robot autonome sous-marin (AUV) permet une exploration plus efficace des grands fonds. Le Nautile est mis en œuvre à partir des navires hauturiers de la Flotte océanographique française : L’Atalante (84 mètres) et le Pourquoi pas ? (107 mètres).
Dans le cadre de France 2030, le projet reflétera les acquis technologiques de la recherche et de l’industrie françaises, il fédérera des entreprises spécialisées entretiendra la capacité de plongée habitée profonde de la France tout en l’adaptant aux enjeux de la prochaine décennie. Le prolongement de l’activité du Nautile est rendu possible grâce à un financement de 33 millions d’Euros du Secrétariat général pour l’investissement (SGPI) via l’Agence nationale de la recherche (ANR).
Carte d’identité du Nautile
Diamètre intérieur de la sphère : 2,10 m3 hublots à grand champ de vision et 10 projecteurs à LED (vision directe jusqu’à 15 m de distance)Un sonar qui permet la détection d’objets ou d’obstacles sur un rayon de 300 m2 bras manipulateursDes capteurs vidéo haute définitionUne atmosphère intérieure normale en termes de pression et de composition chimiqueMatériau : alliage de titaneAutonomie (travail sur le fond) à 6000 m : 6 hDurée maximale d’une plongée : 11 hRayon d’action : 10 kmCapacité d’emport de matériel scientifique : 200 kg ou 600 litres
Une fenêtre sur les profondeurs
Depuis le XIXe siècle, le monde mystérieux des abysses a été approché pas à pas. Qu’il s’agisse de la mise en évidence in situ de la tectonique des plaques, des avalanches sous-marines, des aléas liés aux tremblements de terre profonds, des sources hydrothermales, véritables oasis de vie, les avancées relatives à la compréhension du fonctionnement des océans et de leurs écosystèmes ont été remarquables depuis les années 1970 grâce aux progrès de la technologie. Le submersible Nautile demeure l’un des acteurs majeurs de ces explorations. Il fait partie du cercle restreint au niveau mondial des sous-marins habités grands fonds :
le sous-marin Alvin (Etats-Unis), mis en service en 1964, immersion maximale à 6500 mètres
le sous-marin Shinkai (Japon), mis en service en 1989, immersion maximale à 6500 mètres
les deux sous-marins MIR (Russie), mis en service en 1987, immersion maximale à 6000 mètres
le sous-marin Jiaolong (Chine), mis en service en 2010, immersion maximale à 7000 mètres
Téléchargez le communiqué de presse
À propos de la Flotte océanographique française, par l’Ifremer
La Flotte océanographique française sillonne les mers du monde pour mieux connaître et protéger l’océan, de la côte au large, et de la surface jusqu’aux abysses. Cette très grande infrastructure de recherche (labellisée IR* par le ministère de la Recherche) répond aux grands enjeux actuels en sciences et technologies marines.
Dotée de dix-sept navires et de six engins sous-marins, elle est ouverte à la communauté scientifique française et européenne et contribue à l’excellence de la recherche fondamentale et appliquée. Elle répond aussi à des missions de surveillance ou de service public pour le compte de l’État, et ses équipes sont sollicitées dans le cadre de partenariats avec les entreprises. Opérée par l’Ifremer et sa filiale d’armement Genavir, elle est l’une des cinq plus grandes flottes scientifiques dans le monde.
Plus d’informations sur : https://www.ifremer.fr/fr/flotte-oceanographique-francaise
Découvrir le film de la Flotte océanographique française
Contacts presse
Ifremer
Sacha Capdevielle / Alexis Mareschi
06 07 84 37 97
06 15 73 95 29
presse(at)ifremer.fr