Journée d’animation Écophyto Maturation
Quelle sont les particularités des projets soutenus par le programme Ecophyto Maturation porté par l’ANR et pourquoi cet instrument est original ?
Le programme Ecophyto Maturation a été construit en 2018, à la suite d’un constat de l’axe recherche du Plan Ecophyto, constat partagé avec l’ANR, sur le fait que le développement de solutions pour atteindre les objectifs du plan Ecophyto était insuffisant. Des résultats potentiellement intéressants existaient dans les laboratoires de recherche mais ne donnaient pas lieu à des développements débouchant sur des solutions permettant d’atteindre les objectifs du Plan Ecophyto. Dans le processus de création d’une innovation destinée à la résolution d’un problème concret, on sait qu’il existe une étape difficile, celle du passage entre des résultats de recherche obtenus dans les laboratoires publics et leur reprise par le secteur privé. Sur une échelle mesurant le degré de maturité d’une innovation, l’échelle TRL, il s’agit de passer d’un TRL 4 (validation en laboratoire) à un TRL 6 (démonstration en situation réelle). Le programme Ecophyto Maturation est né de ce constat et a permis depuis son lancement en 2018 de financer 27 projets de recherche associant à chaque fois au moins un laboratoire de recherche public et une entreprise ou acteur du monde socioéconomique.
Quels sont les champs d’exploration de ces projets de maturation scientifique ? Pouvez-vous donner quelques exemples ?
Tous les domaines de recherche permettant de travailler sur des solutions qui visent à contribuer aux objectifs du Plan Ecophyto, de diminuer l’usage et l’impact des pesticides en agriculture sont concernés par ce programme. Les projets concernent l’élaboration d’outils d’aide à la décision pour limiter l’usage de pesticides, des solutions pour reconcevoir des systèmes de cultures plus résilients face aux bioagresseurs et des produits de biocontrôle pour remplacer les produits de synthèse dans la protection des cultures.
Plusieurs projets visent à développer de nouvelles solutions de biocontrôle qui soient opérationnelles et économiquement viables pour les agriculteurs. Ainsi les scientifiques connaissent bien la possibilité d’utiliser des trichogrammes de petites guêpes parasitoïdes qui s’attaquent aux œufs de nombreuses espèces de lépidoptères ravageurs. Dans le projet BIDIM’ financé en 2018, les chercheurs associés à plusieurs partenaires des filières professionnels et entreprises du secteur ont travaillé à étudier la faisabilité du déploiement des solutions, à la fois en améliorant l’efficacité des trichogrammes auxiliaires candidats par des évaluations au laboratoire et au champ et en identifiant les acteurs potentiellement intéressés ainsi que leurs attentes et logiques d’implication.
D’autres projets cherchent à développer des Outils d’Aide à la décision (OAD) permettant aux agriculteurs de mieux suivre la présence de ravageurs et l’efficacité des pratiques qu’ils mettent en place. Ainsi le projet PARADE vise à développer des OAD destinés à aider les agriculteurs (viticulteurs et céréaliers) dans la mise en place de pratiques de gestion des ravageurs, qui prennent en compte la régulation biologique opérée par les parasitoïdes, pour réduire l’utilisation d’insecticides de synthèse.
Enfin, des projets traitent de la transformation des systèmes de cultures et de la combinaison de leviers pour développer des systèmes résilients aux bioagresseurs. Ainsi pour les producteurs de betterave confrontés à la difficulté de lutter contre la jaunisse, maladie transmise par des pucerons, le projet AGIR coordonné par l’Institut technique de la betterave auquel sont associés plusieurs laboratoires de recherche, travaille sur la combinaisons de deux leviers complémentaires : la sélection de variétés de betteraves qui altèrent le comportement alimentaire du puceron et l’utilisation de plantes de service permettant de réduire son installation (effet visuel, olfactif).
Quel bilan peut-on dresser des 3 éditions de ce programme sur le plan du développement de solutions opérationnelles ?
Le secteur du biocontrôle est certainement le secteur économique qui s’est le plus mobilisé dans ce programme (avec 17 projets sur les 27 qui ont été financés). Plusieurs pistes prometteuses sont étudiées, que ce soit dans le domaine de l’utilisation de macroorganismes ou de microorganismes pour lutter contre les insectes ravageurs et les maladies fongiques ou le développement de médiateurs chimiques et de substances naturelles dans un objectif de contrôle des bioagresseurs ou de renforcement des défenses des plantes, ou enfin dans la combinaison de différents leviers. Dans certains cas, des brevets ont été déposés, et des start-ups sont en voie de création. Dans d’autres des recherches complémentaires sont nécessaires pour aller plus loin vers une mise sur le marché.
Les secteurs les plus concernés par les projets sont les grandes cultures (12 projets), la vigne (7 projets), et l’arboriculture et les cultures maraichères (8 projets). En termes de diminution potentielle des produits phytosanitaires de synthèse, les insecticides sont les plus concernés par les solutions proposées, viennent ensuite les fongicides. La question des herbicides, plus difficile à traiter, fait l’objet de deux projets, l’un en biocontrôle, l’autre en désherbage mécanique.
Quels obstacles demeurent au transfert de résultats scientifiques probants vers leurs mises en applications concrètes ?
Le déploiement des solutions en contexte réel se heurte néanmoins à des obstacles qui peuvent rester difficiles à surmonter. Pour beaucoup de solutions de biocontrôle, telles que celles basées sur des auxiliaires des cultures ou des microorganismes, les modèles économiques des entreprises restent à inventer car ils sont différents de la commercialisation des produits phytosanitaires habituels. Souvent aussi l’étroitesse des marchés, ou leur incertitude rend difficile la création d’entreprises. Des travaux en sciences sociales sont souvent nécessaires pour analyser l’acceptabilité des solutions par les agriculteurs et leurs conseillers, ainsi que les conditions économiques et réglementaires du développement de ces nouvelles solutions.
S’inscrire à la journée du 12 décembre
Consulter le programme de la journée
Informations pratiques
Date : Jeudi 12 décembre 2024 de 9h00 à 17h30
Lieu : Ministère de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques – La Défense – Tour Séquoia – 1 Place Carpeaux, 92800 Puteaux