« La science est un sport d’endurance »
Cinq ans après son déploiement, quel bilan tirez-vous de ce programme du point de vue de l’amélioration des performances sportives ?
Jacques Mercier : Je ne cache pas mon enthousiasme ! Avec ce programme, l’État a fourni un effort financier sans précédent (20 millions d’euros) au bénéfice de la recherche dans le domaine du sport de haut niveau. Il s’agissait d’associer le mouvement sportif et la communauté scientifique autour d’un même objectif : financer des projets de recherche très innovants pour la performance des sportifs en prévision des Jeux olympiques de Paris 2024. Un jury pluridisciplinaire a été constitué et a sélectionné des travaux pertinents, tant sur le plan sportif que scientifique. Ils ont abouti par exemple à des avancées notables dans des domaines très divers – technologiques, psychologiques, physiologiques, biomécaniques – allant jusqu’à la prévention des blessures.
Y a-t-il une corrélation directe entre les efforts de recherche et l’amélioration des résultats sportifs ?
J. M. : Je ne peux pas garantir un lien immédiat entre ce genre d’investissement et l’augmentation du nombre de médailles obtenues pendant les Jeux. Néanmoins, ce type de programme, qui associe les compétences scientifiques et les besoins des fédérations, ne peut que contribuer à augmenter les chances de succès des sportifs. Le jury a été très exigeant, dès le départ, dans la sélection des projets. Les douze projets qui ont été retenus répondent à des critères précis, à commencer par l’adéquation entre une recherche de pointe et des enjeux concrets que les fédérations, les clubs et les athlètes ont soulevés.
Indéniablement, les résultats scientifiques obtenus aident le milieu sportif à passer des paliers de performance, mais d’autres facteurs sont également à prendre en compte pour décrocher des médailles, comme la forme de l’athlète ou de l’équipe le jour J, ou encore les avancées effectuées en parallèle par d’autres nations.
À quels projets marquants, ayant apporté une transformation des pratiques d’entraînement ou de compétition, pensez-vous ?
J. M. : Préparation mentale, réalité virtuelle, hypoxie, technologies d’aérodynamisme… L’éventail des thématiques et des disciplines était très large ! Je tiens à citer le projet Paraperf car il est le symbole d’un dialogue fécond entre sportifs et scientifiques. Ce projet a notamment permis d’optimiser les performances des athlètes en fauteuil roulant dans le cadre de neuf sports représentés aux Jeux paralympiques : le rugby, le basket-ball, le badminton, les sports de précision… Je pense aussi au projet D-Day : cette collaboration entre la fédération de natation et plusieurs laboratoires a permis d’optimiser les dernières semaines d’entraînement afin que les athlètes soient dans un optimum de forme le jour J.
Ces projets sont emblématiques d’une capacité des laboratoires à transférer leurs résultats auprès des fédérations ou des clubs et de les intégrer directement dans les programmes d’entraînement des athlètes.
La dynamique enclenchée par le programme va-t-elle se poursuivre au-delà des jeux ?
J. M. : Nous souhaitons que cette dynamique ne s’essouffle pas. Me concernant, je prône même un élargissement des thématiques de recherche à des enjeux autres que la seule performance en sport de haut niveau. Il serait notamment pertinent de reprendre cette formidable dynamique du programme, pour renforcer la recherche dans les domaines de la physiologie, de l’exercice et de l’activité sportive, au bénéfice de tous les citoyens et de leur santé.
La science est, elle aussi, un sport d’endurance. Elle a besoin de temps long pour que ses avancées aient un effet sur le sport de haut niveau et participent au développement des activités physiques accessibles à toutes et tous.
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